Lorsque l’on a été victime de violences sexuelles, le rapport au corps change. On n’est plus pareil, on ne se sent plus pareil. C’est comme si il nous manquait une partie de nous-même. Et cela rejaillit à tous les niveaux et dans tous les domaines de notre vie, y compris aussi dans notre sexualité.
Nous n’en sommes pas toujours conscient ou bien on se dit qu’en effet, il y a quelque chose d’étrange dans notre vie sexuelle. On ne parvient pas toujours à comprendre ce que c’est.
Si après avoir vécu des violences sexuelles, on est protégé, mis en sécurité et que l’on a accès à des soins thérapeutiques adaptés, alors, l’impact des actes de violences sexuelles sur notre corps et nos parties intimes pourra être réduit. La mémoire traumatique pourra muer. De même, la mémoire traumatique corporelle pourra évoluer. Nos états plus ou moins profonds de dissociation seront atténués. On pourra en prendre conscience. Et, doucement, on retrouvera du pouvoir sur son corps, ses parties intimes.
Ce sera comme se rencontrer une toute nouvelle fois. S’apprivoiser.
Lorsque l’on n’a pas pu être entendu, protégé ou soutenu, il va s’écouler souvent beaucoup de temps. Il sera alors plus difficile de faire le lien entre les violences sexuelles subies d’un côté et les situations de souffrance de l’autre ; qu’elles soient corporelles, maux et douleurs physiques en tous genres, qu’elles prennent la forme et conséquence de maladie, qu’elles soient d’ordre psychologiques ou émotionnelles. C’est notre vie entière qui a été impactée à un moment donné ou à plusieurs moments donnés et c’est notre corps et notre coeur qui à plusieurs moments se mettent à en souffrir.
Et, dans l’intime, partagé ou non, les traumatismes agissent aussi.
Alors, notre sexualité est ou devient traumatique. Les conséquences normales des actes anormaux subis prennent le pas. On tombe dans l’hypersexualité ou l’hyposexualité. On n’habite plus notre corps dès que quelqu’un nous frôle. On ne ressent plus rien ou alors on cherche à tout prix à ressentir encore et encore. On se « réfugie » dans l’armoire à côté du lit ou dans la couleur de la couette. On sait que l’on vient d’avoir un rapport intime, dont on avait envie, mais on ne se souvient que de la couleur de la couette et on a une très légère sensation d’avoir eu un rapport sexuelle. C’est comme si on n’était plus vraiment nous-même. Et, on ne peut pas faire autrement… du moins pour l’instant. On développe des « pratiques » automatiques, pour que ça se fasse, ou que ça passe. On n’est plus vraiment conscient. Ou alors, on peut aussi prendre le pouvoir, dominer la situation, tout contrôler, comme ça, on a la sensation de savoir ce qu’il va se passer et surtout comment.
En réalité, il n’y a pas de rencontre à l’autre dans cet instant. Il n’y a pas d’intime partagé, d’intimités partagés. On est comme réfugié dans une partie de nous-même ou alors on est tout en dehors de nous-même.
Fort heureusement, il est possible de sortir de cette sexualité traumatique. On peut, par un chemin de guérison, un chemin thérapeutique, parvenir à prendre conscience de cette sexualité que l’on vit réfugié. On peut découvrir ce qu’il se passe vraiment dans notre corps juste avant le moment d’avoir un rapport intime avec une personne. On peut comprendre que son corps souffre de certaines pratiques qu’en réalité on ne désire pas. On peut adresser des messages à son propre corps pour parvenir à renouer le dialogue avec lui et réussir, enfin, à ressentir. A se dire que l’on vit pleinement y compris dans ce moment d’intimité partagée, choisie et souhaitée.
Sortir de la sexualité traumatique est un chemin, une prise de conscience d’abord puis une rencontre avec soi-même, les parties de son corps les plus intimes.
Dans cette quête, il est important de se dire que notre corps est précieux, important. C’est là la première clé.