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La fellation sur le corps d’un garçon enfin reconnue comme étant un viol !

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C’est l’une des avancées de la loi n°2018-703 du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes. L’article 2, I, 2° de la loi dispose que « Au premier alinéa de l’article 222-23, après le mot : « autrui », sont insérés les mots : « ou sur la personne de l’auteur » ; »

Cette insertion dans la définition juridique du viol de l’expression « ou sur la personne de l’auteur » est une évolution favorable à une meilleure protection des enfants mais aussi des majeurs contre le viol.

En effet, l’article 222-23 du code pénal est désormais rédigé ainsi :

« Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol.

Le viol est puni de quinze ans de réclusion criminelle. »

En pratique, que cela désigne-t-il ?

Cela signifie un élargissement de la définition du viol et donc un élargissement des situations réprimées comme étant un viol. Tomberont désormais sous le coup de l’infraction de viol, toutes les situations dans lesquelles, le corps de l’enfant est utilisé pour pénétrer le corps de l’auteur et toutes les situations où on demande à un enfant de pénétrer le corps de l’auteur, de quelque manière que ce soit (dixit l’expression « de quelque nature qu’il soit). Autrement dit, lorsqu’un garçon subit une fellation de la part d’une femme ou d’un homme, c’est-à-dire que c’est le pénis du garçon qui pénètre le corps de la femme auteur ou de l’homme auteur, alors, il y a désormais viol.

De manière générale, le fait de demander à un enfant d’introduire un de ses membres, doigt, organe génital, langue ou encore le fait de demander à un enfant d’introduire des objets dans un ou des orifices génitaux d’un auteur sont désormais qualifiés de viols.

Initialement le projet de loi présenté à l’Assemblée nationale ne présentait pas cet apport juridique.

Se prononçant sur le projet, la Commission des lois a souhaité élargir la définition du viol, se justifiant ainsi :

« b. L’élargissement de la définition du viol

Sur l’initiative de votre rapporteure et suivant l’avis favorable du Gouvernement, la Commission a élargi la définition du crime de viol posée par l’article 222-23 du code pénal pour y inclure l’acte de pénétration sexuelle imposée à la victime par et sur l’auteur, aujourd’hui considéré comme une agression sexuelle autre que le viol, à la différence de l’acte de pénétration imposé par l’auteur sur la personne de la victime (bis).

En effet, la Cour de cassation, s’en tenant à la lettre de l’article 222-23 précité, qui prévoit que « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol », considère que l’élément matériel du crime de viol n’est caractérisé que si l’auteur réalise l’acte de pénétration sexuelle sur la personne de la victime. N’est donc pas constitutif d’un viol le fait pour une femme d’abuser de l’autorité dont elle dispose sur un jeune garçon pour lui imposer d’avoir des relations sexuelles (64 : Cass. crim., 21 octobre 1998, n° 98-83.843) ou les fellations pratiquées par l’auteur sur la victime (65 : Cass. crim., 22 août 2001, n° 01-84.024).

 

Les discussions autour de la formulation la plus adéquate ont ensuite été nombreuses afin de trouver les termes juridiques les plus adaptés. Finalement, nos parlementaires tombèrent d’accord pour ajouter les termes « sur la personne de l’auteur« .

Jusqu’à cette loi du 3 août 2018, la loi et la jurisprudence étaient claires en la matière. (voir notre précédent article à ce sujet). L’acte de fellation pratiqué sur le corps d’un garçon ne s’apparentait qu’à une agression sexuelle au sens de l’article 222-22 du code pénal. Les garçons étaient donc moins protégés contre le viol, de même et par extension que les filles, qui garçons comme filles pouvaient subir les stratégies d’agressions les plus perverses des auteurs de violences sexuelles ayant connaissance de la loi et dans lesquelles ils faisaient participer l’enfant à des actes de pénétration sexuelle qui n’avaient lieu que sur leur propre corps, entendez celui de l’auteur et non sur le corps proprement-dit de l’enfant. Alors, le glissement de la notion de viol à celle d’agression sexuelle voir d’atteinte sexuelle sur mineur était encore plus aisé faisant tomber certains délais de prescription et qui plus est encore les peines et risques de poursuites criminels.

Cette reconfiguration juridique signifie désormais que tout acte de nature sexuelle pratiqué en utilisant le pénis d’un garçon (fellation, sodomie, pénétration vaginale) est désormais reconnu comme étant un crime, qu’il devra donc être jugé devant une cour d’assises et non plus un tribunal correctionnel. Les jeunes hommes seront aussi, par extension, mieux protégés car l’article 222-23 du code pénal s’applique de manière indifférenciée aux enfants, mineurs, mais aussi aux adultes majeurs. Ainsi, dans ces situations de violences sexuelles, les délais de prescription ne seront plus ceux d’un délit mais ceux applicables à un crime et les peines encourues seront aussi plus importantes.

De manière corrélative, les cyber-actes de violences sexuelles seront également plus lourdement sanctionnés et sanctionnables. Et, s’agissant des violences sexuelles entre mineurs, il conviendra de transmettre notamment aux adolescents une définition plus précise de l’acte de viol afin qu’ils puissent mieux s’auto-protéger et connaître leurs droits. Par effet de ricochet, on peut s’attendre à ce que le décalottage forcé et les autres actes de violences sexuelles propres aux garçons soient mieux sanctionnés.

S’agissant de la pratique judiciaire, est-ce pour autant un pied de nez à celle de la correctionnalisation des viols (procédure qui consiste à nier l’acte de pénétration d’un viol pour qu’il soit jugé par un tribunal correctionnel) notamment en cas de fellation (dont on sait que ce sont les principaux viols correctionnalisés) ? Cela n’est que peu certain. Mais, à tout le moins, cela ouvre le droit aux hommes d’agir en justice pour viol et de faire valoir leurs droits comme tels.

Cette modification de la définition juridique du viol renforce ainsi la protection des enfants contre tous les actes de violences sexuelles qu’on leur imposerait.

Autre point important ; notre définition juridique du viol intègre aussi pour la première fois le terme « auteur » qui permettra à la pratique judiciaire mais aussi dans les méthodes de prévention, de bien considérer et rappeler que l’enfant n’est jamais consentant à des violences sexuelles quelles qu’elles soient.

Depuis plusieurs années maintenant, on sait et elle a été identifiée comme telle par étapes, que tous les auteurs de violences sexuelles ont la même stratégie d’agression. Choisir sa victime, l’isoler, l’agresser, inverser la culpabilité, assurer son impunité, verrouiller le secret. Ainsi, s’appuyant sur ce terme d’auteur apparu dans la nouvelle définition juridique du viol, les enquêteurs mais aussi les juges d’instruction et les avocats pourront appuyer les dires d’un enfant victime dont le corps ou les gestes ont été utilisés pour pénétrer celui d’un majeur et aussi le rassurer sur le fait que ce n’est pas parce que l’enfant a eu un mouvement vers le corps de l’auteur, un geste de pénétration qu’il ou qu’elle est « coupable de son propre viol ».

Plus d’enfants pourront défendre leurs droits, plus de garçons et plus de filles aussi. Or, on sait que les auteurs ne font bien souvent pas qu’une seule victime, que les violences sexuelles s’inscrivent dans un continuum qui peut toucher tous les enfants. Cela renforce pour toutes les victimes la capacité de pouvoir s’allier un peu plus pour lutter contre toutes les formes de violences sexuelles.

Cette évolution juridique permettra enfin de renforcer dans les discours que l’auteur est le seul responsable des viols et autres agressions sexuelles qu’il a fait subir à l’enfant et cela peu importe son âge. Cela permettra de renforcer à plus long terme le statut d’enfant victime de viol(s), d’enfant victime d’inceste, d’enfant victime de pédocriminalité, d’enfant victime de mise en prostitution, d’enfant victime de cyber-violences sexuelles et peut être enfin de permettre une prise de conscience encore plus globale pour créer des structures adaptées, partout en France, à leur écoute, leur prise en charge et leur accompagnement en soin jusqu’à guérison complète de leur traumatismes, physiques et psychiques.

Si cette avancée juridique n’a que peu été relayée dans les médias. Gageons que la société civile s’en chargera.

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