Il y a quelques temps, deux articles parus dans la presse s’interrogeaient sur le sujet : l’éducation sexuelle doit-elle passer par la pornographie ?
Dans une société hypersexualisée, les avis semblent s’orienter vers un « oui mais ».
Dans son article paru à la Matinale du Monde, Maïa Mazaurette nous explique :
« Il n’y a pourtant pas de raisons d’opposer pornographie et éducation. La pornographie n’est qu’une mise en scène explicite de ce qu’habituellement on tient caché. Elle peut être photographique, littéraire, auditive. Et si les jeunes se sentent mal à l’aise lors des apprentissages en groupe et qu’ils préfèrent un support vidéo, il n’y a aucune raison de s’en priver. Visualiser ne suffit pas, certes, mais cela peut combler la curiosité et compléter une information. Des sites comme LoveMatters ou MakeLoveNotPorn prouvent que c’est possible. Du moins si deux conditions sont respectées : un contenu de qualité et une bienveillance dans les intentions. »
Dans la même dynamique, un article paru sur Slate nous rapporte que Christian Graugaard, professeur de sexologie à l’université d’Aalborg au Danemark considère que dès l’âge de 13 ans, les élèves devraient être autorisés à discuter d’images et de littérature pornographiques dans le cadre des cours d’éducation sexuelle. Son argument est de dire que les jeunes font « partie d’une société post-moderne sexualisée » et qu’à ce titre, ils devraient, « avec des professeurs formés » pouvoir développer une approche critique de ce qu’ils voient.
Mais de quoi parle-t-on réellement ?
Revenir sur ce que sont l’éducation sexuelle et la pornographie est ici fondamental. Pourquoi ? Car c’est réellement ce qui permet de questionner le discours et les arguments des uns et des autres.
De quoi parle-t-on ?
L’éducation sexuelle, s’agit-il d’accompagner un questionnement sur soi, sur ses émotions, ses ressentis, sur son corps et de la manière dont il est fait ? Ou s’agit-il de faire entrer une personne dans la sexualité ?
La pornographie, s’agit-il de l’exploitation économique de violences sexuelles ? Ou s’agit-il d’un commerce comme un autre ?
Lorsque l’on souhaite accompagner des enfants dans la compréhension du fonctionnement de leurs ressentis, de leurs corps et de leurs parties intimes, que vise-t-on réellement ?
Est-ce l’apprentissage d’un savoir, d’une liberté ? Que souhaite-t-on réellement leur transmettre et pourquoi ? Pour quoi faire ? Qu’ils deviennent de bons consommateurs d’images pornographiques ? Qu’ils deviennent des enfants puis adultes respectueux d’eux-mêmes et de tous ?
Parler de la pornographie, en la définissant telle qu’elle est vraiment : l’avilissement, l’assujettissement et l’objectivation d’êtres humains ne pourrait-il pas être très simplement le point de départ d’une discussion collective sur le sujet et cela sans pour autant en venir à créer des mémoires traumatiques supplémentaires en imposant le visionnage de telles images ?
Encore aujourd’hui, nier que la pornographie est une violence sexuelle filmée, c’est tout simplement empêcher de prévenir les violences sexuelles dont pourraient être victimes non seulement les enfants mais aussi les majeurs.
Considérer que l’éducation sexuelle d’un enfant peut se faire au travers d’images violentes, c’est lui démontrer que le respect n’existe pas, ni le respect de sa personne, ni le respect de son corps et de ses parties intimes, ni le respect de ses ressentis et sentiments.
Plusieurs associations savent d’ailleurs parfaitement créer des espaces de paroles suffisamment bienveillants pour permettre à tout enfant qui le souhaiterait de poser des questions en matière de sexualité et surtout lui permettre d’y trouver des réponses respectueuses de sa personne.
Ne soyons pas dupe face aux industries-exploitantes économiques des violences sexuelles, le fait qu’elles créent sur internet des espaces de soit-disant « éducation sexuelle » n’est en réalité qu’un appât pour former le futur « consommateur » majeur de ces violences.
Aller plus loin :
- pour trouver des ressources en matière d’éducation sexuelle : lire notre article sur l’hypersexualisation
2 réflexions au sujet de « La pornographie n’est pas un outil d’éducation à la sexualité »